Un accord de paix entre le gouvernement du Sénégal et les rebelles séparatistes de la Casamance fait espérer que l’un des conflits les plus longs du continent pourrait se terminer prochainement.
Le 23 février, après trois jours de réunion, le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko et des membres du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC) ont signé un accord à l’occasion d’un événement accueilli par la Guinée-Bissau.
- Sonko a qualifié la signature de « très grand pas en avant vers la paix ».
« La Guinée-Bissau et le Sénégal doivent œuvrer ensemble pour promouvoir la paix dans la Casamance, parce que l’instabilité de cette région nous affecte tous », a-t-il dit, selon la société de diffusion d’état RTS.
L’accord de paix a été signé un an après l’entrée en fonction de M. Sonko, qui est lui-même originaire de la Casamance. C’est le plus récent d’une série d’accords avec les rebelles de Casamance, qui se sont fragmentés en au moins trois sous-groupes et qui participent de façon intensive dans le trafic illicite du bois, du cannabis et autres produits.
La région culturellement distincte de la Casamance est séparée du reste du pays par la Gambie. Les résidents se plaignent depuis longtemps d’avoir été laissés pour compte en matière de développement et de services sociaux, ce qui a incité certains à soutenir une insurrection armée luttant pour l’indépendance. Mais les combats, qui remontent à 1982, ont fait de nombreuses victimes. Plus de 60.000 ont été déplacés, 5.000 ont été tués et les mines terrestres prolifèrent dans la région.
Les citoyens de la région, qui en ont assez de la guerre, veulent aujourd’hui la paix à tout prix.
« Nous sommes nés dans la guerre, nous avons grandi dans la guerre et nous nous disons en permanence qu’on ne peut pas mourir et qu’on ne doit pas mourir dans la guerre », déclare au Guardian l’activiste Madia Diop Sané, chef du groupe appelé mouvement Vision Citoyenne.
Le tout dernier accord avec l’un des trois groupes rebelles comporte un pardon présidentiel pour les rebelles emprisonnés, l’amnistie pour les combattants et un programme de réintégration, selon Vincent Foucher, expert du conflit au Centre national de la recherche scientifique en France. Mais le Dr Foucher doute toujours que cet accord puisse définitivement mettre fin au conflit, en notant que l’une des factions pures et dures n’a pas encore signé.
« Je ne vois toujours pas de solution. C’est la continuation des discussions sans fin avec un mouvement divisé, dit-il. L’État sénégalais n’est pas prêt à offrir les concessions politiques ou administratives demandées par les autres factions qui n’ont pas signé l’accord de paix. »
Mais d’autres espèrent que M. Sonko, qui était auparavant le maire de Ziguinchor (ville principale de la Casamance), aura une nouvelle perspective et détermination pour affronter le problème.
Lamine Coly, membre de l’Initiative pour la réunification des ailes politiques du MFDC, déclare à Radio France Internationale : « Le nouveau régime prend les choses au sérieux. … Je vois que c’est ce qui a été fait qui est en train d’être consolidé. En 2022, c’était un accord qui a été signé, mais qui n’avait pas été concrétisé. Donc là, avec la présence du chef du gouvernement du Sénégal, je pense que l’on passera au concret. »
Comme preuve supplémentaire de l’engagement du Sénégal envers la région, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a révélé l’an dernier un plan visant à investir 53 milliards de francs CFA, soit environ 88 millions de dollars, pour éliminer les mines terrestres de la région et soutenir le développement économique. Le plan cherche à rétablir la présence de l’État dans la Casamance en construisant des écoles, des installations de soins de santé et des bureaux gouvernementaux.
« Cette initiative représente des investissements importants dans l’avenir de la Casamance, en adressant les perturbations économiques et sociales de longue date de la région causées par toutes ces années de conflit », a déclaré M. Sonko selon The Gambia Journal.