Le major Hans Radegod dirige la Garde côtière des Seychelles dans une mission qui semble accablante : stopper l’afflux de l’héroïne et d’autres drogues illégales dans les îles de son pays.
Sa flotte minuscule constituée de quatre vaisseaux patrouille les 115 îles de la nation et les 491 km de littoral. Elle combat les trafiquants en provenance d’Afghanistan, d’Iran et du Pakistan qui utilisent les Seychelles comme un point de transbordement pour les milliers de kilos d’héroïne qui sont acheminés chaque année vers les pays africains.
Le trafic de l’héroïne fait des ravages aux Seychelles, où on estime que 10 % de la population de près de 100.000 résidents sont dépendants de cette drogue. C’est le taux le plus élevé de toxicomanie de l’héroïne dans le monde, et il a presque doublé depuis 2018.
Vanda Felbab-Brown, analyste chez la Brookings Institution basée aux États-Unis, a déclaré récemment au service d’actualité Deutsche Welle (DW) : « 10 % est un chiffre très élevé. C’est une situation vraiment très grave avec des conséquences massives, non seulement pour la qualité de vie des personnes, mais aussi, par exemple, pour la santé des travailleurs. »
Une grande partie de ces travailleurs est employée dans le tourisme, qui représente plus de 46 % de l’économie de 16,7 milliards de dollars des Seychelles.
Avec un produit national brut de 2,1 milliards de dollars et un revenu par habitant de 32.400 dollars, les Seychelles est l’un des pays les plus riches d’Afrique. Le chômage est d’environ 3 %. Toutefois, l’héroïne est tellement prédominante dans le pays que son prix a baissé de 80 %. Une simple dose qui coûtait jadis 35 dollars coûte aujourd’hui 7 dollars.
Bien que les eaux bleues et le sable blanc des îles attirent les touristes, certains viennent aussi pour les drogues.
Un trafiquant de drogue et toxicomane identifié comme « Bobo » déclare à DW : « J’ai beaucoup de clients. Des filles, des hommes, des étrangers, des gens qui viennent comme touristes, pour n’en nommer que quelques-uns. »
Bobo reconnaît que le trafic de drogue affecte énormément les gens.
« Je suis conscient que j’affecte beaucoup de familles. Je le sais. Je n’ai pas beaucoup d’éducation. Que puis-je faire ? »
Pour endiguer l’afflux des drogues qui traversent l’océan Indien occidental, le gouvernement des Seychelles œuvre avec plusieurs partenaires internationaux pour patrouiller sa vaste zone économique exclusive de 1,3 million de kilomètres carrés pour combattre les trafiquants de drogue.
Vers la fin 2023, les autorités ont intercepté deux Iraniens sur un boutre dans les eaux territoriales des Seychelles, qui transportaient 622,6 kilos d’héroïne et 388,6 kilos de méthamphétamine, selon les archives de la Cour suprême des Seychelles.
Peu après, la Garde côtière des Seychelles a intercepté un autre boutre à environ 60 km au Nord de Mahé, l’île principale des Seychelles, et ont arrêté deux Iraniens et un Pakistanais pour transporter des drogues illégales, notamment plus de 22 kilos d’héroïne.
En 2023, les tribunaux ont condamné huit Iraniens accusés de trafic de drogue à 20 ans de prison et les ont renvoyés en Iran.
À la fin 2023, les Seychelles ont signalé que le pays avait détruit 1,2 million de tonnes de drogues illégales, y compris une quantité confidentielle d’héroïne, qui avaient été capturées au cours des 18 mois précédents.
« Si nous jugeons le succès par la quantité de drogue détruite aujourd’hui, ceci est un énorme succès pour les Seychelles », a déclaré à l’époque Rony Govinden, juge en chef de la Cour suprême.
Les autorités des Seychelles savent qu’elles sont devancées par le défi de réduire la toxicomanie grâce aux traitements.
« Notre plus grand défi est la capacité humaine, le personnel formé pour travailler avec ces gens », déclare à DW Marie Josett, directrice générale de la division des abus de substance au ministère de la Santé des Seychelles.
Pour sa part, le major Radegod reconnaît que ses forces sont surclassées par le nombre de trafiquants de drogue qui traversent les eaux de son pays. Mais il n’abandonne pas.
Il déclare à DW : « Les points d’entrée sont nombreux, nos forces sont peu nombreuses. Mais nous travaillons d’arrache-pied pour fournir la sécurité à la population. »