PERSONNEL D’ADF
James faisait de la moto au Nord-Ouest du Burkina Faso, en route pour le Sénégal, lorsque des extrémistes armés l’ont enlevé, lui ont bandé les yeux et l’ont amené dans leur camp.
Après avoir insisté qu’il n’était pas un espion et avoir survécu l’interrogation par le commandant du camp de terroristes, une bande de combattants est revenue d’une attaque et ont fait feu dans les airs. James, qui était terrifié, n’a pas réalisé qu’ils célébraient quelque chose.
« J’ai pensé que c’était la fin. Je transpirai », dit-il, en racontant son expérience de 2019 pour la première fois, lors d’un entretien de décembre 2024 avec la BBC. Il emploie un pseudonyme pour sa protection.
Le camp hébergeait environ 500 combattants, des hommes jeunes pour la plupart. Il était divisé en trois sections séparées : les commandants et leur famille, les combattants non gradés et les villageois et soldats capturés.
James a vu les chars d’assaut et les pick-ups cachés dans des tunnels pour les protéger contre les frappes aériennes, les enfants qui portaient des gilets suicides et les femmes munies d’un AK-47 sous leur burqa, prêtes à faire des descentes dans les villages pour voler le bétail.
Il était coincé en plein milieu d’une zone de guerre effervescente.
Le camp appartenait au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), coalition de groupes terroristes affiliée à Al-Qaïda. En août 2024, le GSIM a déclaré qu’il avait tué 532 personnes, plus de deux fois le nombre de tués pendant les deux autres mois les plus sanglants de l’an dernier : 250 tués en mai et 250 autres en juin.
La plupart des décès revendiqués par le GSIM en août 2024 étaient au Burkina Faso, où le groupe a lancé des attaques à grande échelle dans la localité de Barsalogho et le village de Nassougou, selon Jacob Boswall, journaliste principal de BBC Monitoring.
Le Burkina Faso est arrivé en tête de l’indice mondial du terrorisme publié par l’Institute for Economics and Peace pour la première fois en 2023, lorsque les décès dus au terrorisme ont augmenté de 68 % pour atteindre 1.907, chiffre stupéfiant qui représentait le quart de tous les décès dus au terrorisme dans le monde en 2023.
L’indice a récemment caractérisé le Sahel de nouvel épicentre du terrorisme mondial. Pendant le premier semestre 2024, les décès signalés dus au terrorisme ont augmenté à un nombre sans précédent de 7.620 au Burkina Faso, au Mali et au Niger, soit une augmentation de 190 % comparé à la même période de 2021, selon le projet ACLED (Armed Conflict Location & Event Data).
Héni Nsaibia, analyste principal d’ACLED pour l’Afrique de l’Ouest, a déclaré à Reuters dans un entretien de septembre 2024 : « Même si les actes sont moins fréquents pendant certaines périodes, ils sont plus meurtriers. Donc le nombre de décès monte en flèche ; si nous considérons le Mali, le Burkina Faso et le Niger, ces trois pays sont en voie de faire en sorte que cette année soit la plus meurtrière. »
Au Ghana, le président sortant Nana Akufo-Addo a loué les accomplissements de son administration lors de son dernier discours sur l’état de la nation.
Il a dit pendant la diffusion du 3 janvier : « La première responsabilité d’un gouvernement est la sûreté et la sécurité de l’état et de son peuple. Je suis heureux de signaler que l’intégrité territoriale de notre pays est intacte et que toutes nos frontières sont sécurisées. »
Mais on craint de plus en plus que les militants extrémistes ne se propagent inévitablement vers les pays du littoral du golfe de Guinée, territoires qu’ils convoitent depuis longtemps et qu’ils ont pris pour cible dans le cadre de leur expansion.
Le gouvernement du Ghana a lancé une campagne de service public pour empêcher les jeunes de rejoindre les groupes extrémistes. Mawuli Agbenu, directeur régional de la Commission nationale sur l’éducation civique basée à Accra, déclare qu’il est au courant du calvaire de James.
Il a dit à la BBC : « Je l’ai rencontré pour essayer de sensibiliser les étudiants du tertiaire. Nous nous engagerons définitivement avec lui pour qu’il devienne un ambassadeur ou un agent influent dans sa communauté. »
James est aujourd’hui un cultivateur au Ghana. Il considère qu’il a eu de la chance lorsque le commandant du camp d’insurgés l’a laissé partir après environ deux semaines passées avec les terroristes. Il a prétendu qu’il sympathisait avec l’idéologie terroriste du groupe et a juré qu’il recruterait pour le GSIM au Ghana.
Il dit : « Le commandant m’a déclaré qu’il me laisserait partir si je l’assurais de lui envoyer plus de combattants. »
Il n’a jamais tenu sa promesse mais il reste bien conscient d’un sentiment de soulagement et de gratitude pour être resté en vie, parce que les paroles du commandant terroriste font écho à son explication que la libération de James était une exception : normalement « ou bien ton cadavre sera renvoyé chez toi, ou bien personne n’entendra plus jamais parler de toi ».