PERSONNEL D’ADF
Alors même que le nombre de cas de terrorisme a baissé en Afrique de l’Est au cours des dernières années, la région est sujette à une hausse renouvelée de piraterie et d’attaques par les cybercriminels.
Workneh Gebeyehu, secrétaire exécutif de l’autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), a récemment dit aux membres de cette organisation alors qu’ils lançaient un projet visant à contrer le crime transnational au Kenya : « Ce sont des menaces qui ont perturbé la vie, affaibli l’économie de nos nations et mis à l’épreuve leur résilience. »
L’IGAD recommande une approche régionale pour maîtriser le crime qui franchit les frontières nationales et affecte des millions de gens dans la région.
Selon Workneh Gebeyehu, le but du mécanisme de coopération et de coordination régionale contre les menaces de sécurité transnationales est de permettre aux pays d’Afrique de l’Est de mettre en commun les renseignements de façon plus efficace, d’harmoniser leur système juridique et de renforcer leur capacité pour présenter un front uni contre les criminels transnationaux.
En œuvrant ensemble, les pays d’Afrique de l’Est ont réussi à dégrader ou limiter les groupes terroristes tels que les chebabs de Somalie, ce qui a conduit à une baisse de près de 20 % de l’extrémisme régional, selon les analystes. Grâce à des missions de sécurité régionales telles que la mission de transition de l’Union africaine en Somalie et son successeur, la mission de soutien et stabilisation de l’UA en Somalie, les forces africaines ont renforcé la sécurité des frontières tout en réduisant les aptitudes d’action des chebabs et de Daech-Afrique de l’Est, groupe affilié à l’État islamique.
Le Kenya a intercepté des combattants terroristes étrangers qui se rendaient en Somalie, y compris ses propres ressortissants essayant de rejoindre les chebabs ou Daech-Afrique de l’Est, et des combattants qui revenaient de l’étranger. Les équipes de contre-terrorisme du Kenya ont décelé et découragé des complots terroristes et répondu à des dizaines d’incidents liés au terrorisme au cours des dernières années.
Malgré ces améliorations dans la lutte contre le terrorisme, la région est sujette à une nouvelle hausse de piraterie au large des côtes de Somalie. Quelques années seulement après avoir noté une absence d’actes de piraterie signalés par les autorités internationales en 2020, le nombre de cas a grimpé à 19 en 2022 et 63 en 2023. Il y a eu 33 cas de piraterie au premier trimestre 2024, soit 27 % de plus que pendant la même période de 2023.
Les pirates basés en Somalie se déplacent vers le Sud, jusqu’à Madagascar et au Mozambique, pour chercher des navires à attaquer, selon les experts des Nations unies.
Yury Fedotov, directeur exécutif de l’Office des Nations unies sur les drogues et le crime (ONUDC), a déclaré lors d’une visite récente de la région somalienne du Pount : « La piraterie est un défi complexe contre la sûreté et la sécurité des économies fragiles d’Afrique de l’Est. »
« Les rançons rapportent des millions de dollars aux groupes criminels, et une partie de cet argent finance d’autres activités du crime transnational organisé telles que la traite humaine et la contrebande des armes et des stupéfiants. »
Selon les plus récentes statistiques de l’ONUDC, 1.186 Somaliens sont aujourd’hui sujets à des poursuites judiciaires dans plus de 21 pays du monde. M. Fedotov a fait appel à une meilleure coopération régionale pour lutter contre la piraterie en mettant un accent particulier sur le développement de la capacité de garde côtière de la Somalie afin d’investiguer les cas présumés de piraterie.
En même temps que les autorités d’Afrique de l’Est affrontent la piraterie, elles font aussi face à la menace des criminels qui cherchent leurs victimes dans le cyberespace.
Le Kenya est presque en tête de la liste des pays africains dont les ressortissants, les entreprises et les agences gouvernementales subissent des cyberattaques.
Uniquement entre avril et juin 2024, l’équipe nationale de réponse aux incidents informatiques du Kenya a enregistré plus de 1,1 milliard de menaces de cybersécurité dans le pays, soit une augmentation de 16 % comparé au trimestre précédent, selon un rapport de l’autorité kényane des communications.
Presque toutes les attaques ont été commises contre les bases de données, les réseaux et les systèmes d’exploitation qui forment l’ossature du système Internet kényan, selon l’autorité. De telles attaques sont en hausse tandis que d’autres, par exemple les attaques par maliciel ou par déni de service, sont en baisse.
Le Kenya est un exemple des menaces dues aux cybercriminels que les pays d’Afrique de l’Est affrontent, mais l’ensemble du continent court un risque de plus en plus grand à mesure que l’accès à l’Internet augmente rapidement sans les lois nécessaires pour combattre le crime en ligne, selon les propos de l’expert en cybersécurité Abiodun Akinwale au magazine numérique onusien African Renewal.
« Sans action décisive, le panorama de la cybersécurité en Afrique pourrait empirer considérablement. L’Internet étant projeté de devenir disponible pour la majorité des Africains au cours des prochaines années, la surface d’attaque numérique augmentera exponentiellement. En outre, les cybercriminels tirent de plus en plus profit de l’IA [intelligence artificielle], de l’apprentissage machine et des outils de pointe pour améliorer leurs opérations. »