PERSONNEL D’ADF
Les enfants sud-africains sont radicalisés à partir de 11 ans et recrutés pour commettre des actes de terrorisme, selon les experts de l’Institut d’études de sécurité (ISS) qui se sont exprimés à l’occasion de la Conférence et expo sur la gestion des frontières à Pretoria en novembre.
Les jeunes des régions de l’East Rand, Hillbrow, Mayfair et Soweto sont radicalisés dans les médersas, ces écoles ou collèges religieux qui enseignent des matières islamiques. Ils sont aussi de plus en plus ciblés par les groupes terroristes sur les réseaux sociaux.
Selon l’institut, le risque n’est pas contré efficacement à cause de la carence des capacités de renseignement. Willem Els de l’ISS déclare dans un rapport de Protection Web : « Ceci perdure de façon soutenue. Si nous ne le gérons pas dans ses premières phases, il pourrait dégénérer. »
La radicalisation des jeunes alimente les trois menaces terroristes principales pesant sur le pays : le terrorisme islamiste, les groupes d’extrême droite et l’émergence de l’Afrique du Sud comme bastion du financement de l’État islamique et autres organisations terroristes. M. Els dit que les groupes d’extrême droite représentent une menace moins grave que les autres parce que ces groupes sont surveillés efficacement.
Un centre du financement du terrorisme
En 2023, le Groupe d’action financière a placé l’Afrique du Sud sur sa « liste grise » parce que le pays n’affrontait pas efficacement la menace de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme. Du fait de son placement sur la liste grise, le pays est sujet à une surveillance économique et une réglementation plus strictes par le groupe.
L’experte anti-terroriste sud-africaine Jasmine Opperman a déclaré dans un rapport publié conjointement par Rédaction Africanews et l’Agence France-Presse : « Le fait que nous soyons une plateforme est désormais accepté internationalement. » Elle ajoute que l’Afrique du Sud est aujourd’hui un « terrain de chasse » pour les transferts d’argent par les terroristes.
L’Afrique du Sud conduit des investigations concernant 20 cas de financement du terrorisme dans le but d’être éliminée de la liste grise, et cela pourrait se produire à la suite d’un autre audit prévu pour l’an prochain, selon Protection Web.
« Pourquoi l’Afrique du Sud est-elle un lieu attrayant pour le financement terroriste ? », a demandé M. Els à la conférence. « L’infrastructure et un système bancaire avancé facilitent les mouvements d’argent. »
Il ajoute que les hauts niveaux de criminalité en Afrique du Sud facilitent l’obtention des fonds illicites et que les hauts niveaux de corruption permettent aux criminels d’agir en toute impunité. Les groupes terroristes travaillent couramment et étroitement avec les syndicats du crime. Une grande partie de l’argent quitte l’Afrique du Sud à destination de la Somalie, de la République démocratique du Congo et du Mozambique.
M. Els exhorte l’Afrique du Sud à développer une approche au terrorisme qui soit proactive plutôt que réactive, et il déclare que le financement du terrorisme et le blanchiment d’argent devraient être continuellement pris pour cible. Il dit que les autorités devraient adopter une « approche plus holistique » de la stratégie sud-africaine du contre-terrorisme, qui est tenue secrète. Il exhorte aussi d’autres pays à mettre en œuvre la stratégie contre le crime organisé transnational de la Communauté de développement d’Afrique australe et sa stratégie de contre-terrorisme.
Des frontières poreuses
Les frontières poreuses du pays exacerbent la menace terroriste. Ces frontières sont gardées par l’autorité de gestion des frontières (BMA), agence mal pourvue en personnel et mal financée qui avait été créée en 2023. Le ministre de l’Intérieur Leon Schreiber a déclaré dans un rapport publié en novembre sur defenceWeb que l’autorité a actuellement une insuffisance de personnel de plus de 3.200 postes et fait face à un déficit budgétaire à moyen terme de 4,3 milliards de rands (240.477.500 dollars) sur trois ans.
Un danger particulier concerne la frontière entre l’Afrique du Sud et le Mozambique, où les troubles sociaux et l’insurrection de la province du Cabo Delgado, qui remonte à sept ans, en fond un centre de recrutement pour les terroristes et un lieu d’activité criminelle. La mission de la Communauté de développement d’Afrique australe au Mozambique s’est retirée en juillet 2024 pour se concentrer en République démocratique du Congo, ce qui a laissé un vide sécuritaire.
Malgré ses carences, l’autorité a récemment enregistré des succès avec les cellules de traite des êtres humains. Le commissaire Michael Masiapato de l’autorité a déclaré à la mi-décembre que des opérations récentes aux points d’entrée de Beitbridge et Lebombo « ont eu des succès importants pour perturber les activités illégales, notamment la traite humaine et le trafic des enfants ».
Le 6 décembre, des gardes de la BMA ont intercepté un taxi utilisé pour essayer de trafiquer 14 enfants mozambicains sans papiers de 4 à 16 ans en Afrique du Sud par Lebombo. Les autorités ont arrêté le chauffeur et remis les enfants au ministère du Développement social.
Le jour suivant à Beitbridge, huit ressortissants du Bangladesh sont sortis d’un taxi sur le côté zimbabwéen de la frontière et ont essayé d’entrer en Afrique du Sud sans document de voyage valide. Les gardes de la BMA les ont interceptés à l’occasion d’une patrouille de routine.
Le commissaire Masiapato a déclaré : « Ces incidents soulignent le rôle crucial joué par les gardes-frontières en protégeant les personnes vulnérables et en évitant l’exploitation de nos frontières par les syndicats du crime. La BMA reste résolue dans sa mission visant à combattre les activités illégales et protéger la souveraineté de l’Afrique du Sud. »