Africa Defense Forum

La police de proximité est sous-utilisée dans les opérations de maintien de la paix

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PERSONNEL D’ADF

Au cours des vingt dernières années, l’Union africaine a autorisé plus de 25 opérations de soutien à la paix sur le continent, mais peu d’entre elles ont inclus la participation de la police de proximité pour combattre l’extrémisme.

Meressa Dessu, chercheur principal à l’Institut d’études de sécurité (ISS) d’Afrique du Sud, a récemment écrit que le moment de changer les choses était venu, alors que l’extrémisme violent se répand sur le continent.

Les emblèmes de la police de proximité, notamment la résolution des problèmes, le partenariat, la livraison des services, l’autonomisation et la prise de responsabilité, aident les policiers à bâtir la confiance à l’aide des engagements soutenus avec les résidents, les groupes communautaires, les propriétaires des commerces et autres.

La police de proximité a réussi à prévenir le crime, réduire les craintes des menaces de sécurité et améliorer la sécurité publique dans le monde. Elle est particulièrement efficace pour combattre la radicalisation au niveau local.

Dans le bassin du lac Tchad, Boko Haram est attrayant pour les jeunes qui sont lésés par des forces gouvernementales oppressives. Les chebabs recrutent fréquemment les jeunes Somaliens en décrivant les opérations de contre-terrorisme comme l’action des forces étrangères, selon l’Institut des États-Unis pour la paix.

Le Dr Dessus écrit : « Au lieu d’accroître les risques de radicalisation par la répression militaire, la police peut fournir des services de sécurité locaux, engager les communautés comme partenaires plutôt qu’adversaires, et gagner la confiance du public. La police déployée dans les missions de paix pourrait aussi former la police locale pour qu’elle suive la même approche, ce qui réduirait les risques de radicalisation et de recrutement par les groupes terroristes. »

Les Nations unies ont souligné les travaux d’Olubayo Ajao, commissaire de police divisionnaire d’Ekpoma (Nigeria). Les résidents le décrivent comme un homme ferme face à la criminalité et une sorte de héros populaire dans la communauté. Il a bâti la confiance en participant régulièrement aux services religieux en tenue de civil, en prenant part aux enterrements et en prenant la parole aux réunions communautaires traitant de la paix et la sécurité.

Il a déclaré au magazine onusien Africa Renewal : « Nous obtenons beaucoup d’informations fournies par les résidents, ce qui nous aide à étouffer dans l’œuf la criminalité. Nous avons arrêté de nombreux ravisseurs. Je participe personnellement à ces opérations. Nous avons récupéré des armes et remis les criminels pour qu’ils soient poursuivis en justice. »

Une telle approche peut aussi aider à extirper les extrémistes engagés dans les crimes locaux. Au Sahel, les groupes terroristes tels que le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) sont engagés dans la contrebande, les enlèvements, l’extraction minière illégale, et le vol du bétail. On sait aussi que les groupes terroristes du continent perçoivent des impôts sur le commerce illégal.

Selon le Dr Dessu, il n’y a pas suffisamment de policiers dans les missions de maintien de la paix de l’UA pour répondre aux autres types de crime.

« L’absence de policiers dans la plupart des missions de l’UA visant à combattre le terrorisme a conduit à un engagement communautaire plus faible et des opportunités manquées pour développer la capacité de la police locale, soutenir les investigations criminelles et traquer les syndicats du crime », écrit-il.

La mission de l’UA en Somalie (Atmis) est l’une des rares missions de maintien de la paix avec un contingent de police, mais ce contingent est insuffisant et ses membres sont mal équipés et mal formés.

« De ce fait, les zones libérées par les soldats de la mission et les forces de sécurité somaliennes retombent souvent sous le contrôle des extrémistes des chebabs, écrit le Dr Dessu. Ceci est dû à leur engagement incohérent avec la population locale et les services de sécurité qui ne sont pas fournis de façon permanente. »

Le Dr Dessu n’est pas le seul analyste qui pense que les missions de maintien de la paix de l’UA ont besoin de davantage de policiers.

Une évaluation de 2023 conduite par la mission de maintien de la paix de l’UA dans le bassin du Tchad, appelée Force multinationale mixte (FMM), exhorte ses états membres (Bénin, Cameroun, Niger, Nigeria et Tchad) à développer la composante policière de la mission. Les forces militaires ne sont pas en général configurées ou formées pour traiter efficacement les questions policières.

Un rapport de l’Institut norvégien des affaires internationales note les succès militaires enregistrés par la FMM pour chasser Boko Haram hors des communautés qu’il contrôlait précédemment et vers les îles du lac Tchad.

Mais dans certaines communautés où une paix relative a été restaurée, les soldats restent installés. Ils effectuent souvent des efforts normalement accomplis par les policiers, par exemple la protection des cultivateurs et la gestion des points de contrôle.

« Cette situation monopolise les ressources militaires disponibles, ce qui limite le nombre de soldats disponibles pour conduite et maintenir des opérations offensives au cœur de ces îles pour vaincre efficacement les terroristes », selon le rapport.

L’évaluation suggère que la division des opérations de soutien à la paix de l’UA pourrait aider les états membres à développer et gérer une composante policière et cesser de déployer des soldats dans les zones de conflit en utilisant plutôt des forces de police nationales.

Elle exhorte les états membres de la FMM à commencer le recrutement, la formation, le financement et le déploiement des composantes policières par déploiement d’une force nationale ou par intégration à la FMM. Le Centre international de maintien de la paix Martin Luther Agwai du Nigeria et le Centre international de formation au maintien de la paix Kofi Annan au Ghana pourraient former les policiers à l’avenir.

« En outre, le partenariat existant entre l’UA et l’UE [Union européenne] fournirait l’opportunité d’obtenir un soutien auprès de la mission de formation de l’UE pour former la composante de police de la FMM », déclare l’évaluation.

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