Les SAF sont accusées de prendre pour cible les civils en fonction de leur ethnicité
PERSONNEL D’ADF
Alors que la guerre civile soudanaise faisait rage en son neuvième mois, les Forces armées soudanaises (SAF) ont été accusées de prendre les civils pour cible en fonction de leur ethnicité.
Un homme âgé de 24 ans avec le nom d’emprunt d’Osman Arbab a déclaré à Al Jazeera que son jeune frère et lui étaient dans un autobus dans la périphérie de la ville d’Atbara au Nord-Est du pays lorsque le service de renseignements de l’armée a arrêté l’autobus et demandé s’il y avait des passagers originaires du Darfour, région de l’Ouest du Soudan, ou du Kordofan dans le Sud. Les villes de là-bas sont considérées comme des bastions des Forces de soutien rapide (RSF), rivales des SAF.
Les deux frères étaient nés au Kordofan mais n’y vivaient plus depuis longtemps. Ils ont été rapidement regroupés avec plusieurs autres jeunes de ces deux régions et accusés de faire de l’espionnage pour le compte des RSF. Ils ont été emmenés dans une installation d’Atbara et ils y sont restés pendant six jours. M. Arbab déclare que les SAF les ont frappés à coups de bâton pour obtenir des confessions. Lorsque cela a échoué, ils ont subi des chocs électriques à l’aide de câbles.
Il se souvient que son frère, patient diabétique, hurlait de douleur. Il a dit à Al Jazeera : « Je pensais que mon frère allait mourir, qu’ils allaient nous tuer. ».
Après douze jours, M. Arbab a versé de l’argent pour leur libération.
« Je leur ai donné 50 dollars pour mon frère et 50 dollars pour moi-même, et ils nous ont finalement laissé partir le matin suivant. ».
Les SAF et les RSF sont toutes les deux accusées de conduire de telles rafles dans le pays, en suscitant la méfiance et l’hostilité généralisées parmi les civils. Selon Al Jazeera, la plupart des bataillons SAF sont composés de Noubas locaux non arabes et d’Arabes locaux du Kordofan. Il existe de fortes perceptions selon lesquelles les officiers militaires arabes sont des sympathisants secrets des RSF.
En janvier, un soldat SAF originaire d’une tribu arabe nomade dans le Kordofan du Sud a été accusé d’avoir collaboré avec les RSF. Une vidéo vérifiée par Al Jazeera montre le soldat suspendu par les pieds à une échelle, alors qu’une photo postérieure semble indiquer que la victime a été torturée à mort.
« Dans le Kordofan du Sud, il y a toujours eu des tensions basées sur l’ethnicité et la tribu, même dans l’armée », déclare Hafiz Mohamad, chercheur soudanais du Kordofan du Sud, à Al Jazeera.
Il dit que lors des guerres civiles précédentes au Soudan, c’était les soldats et les civils noubas qui étaient accusés de collaborer avec des groupes rebelles principalement non arabes. Maintenant, les Arabes sont pris pour cible.
À la mi-décembre, les RSF ont saisi le contrôle de Wad Madani, deuxième ville du Soudan. Lorsque les SAF sont parties, elles ont exécuté des dizaines de personnes, arabes aussi bien que non arabes, selon Al Jazeera.
Un homme utilisant le nom d’emprunt de Mohamad Osman est l’une de dizaines de milliers de personnes qui ont essayé de s’enfuir de Wad Madani. Le service de renseignements militaire l’a arrêté à la fin décembre et a rapidement appris qu’il était membre du comité de résistance pro-démocratique Kalakla.
M. Osman a déclaré à Al Jazeera qu’il avait été emmené dans un centre de détention secret où il avait été torturé pendant des jours et forcé d’observer sept cadavres en train de pourrir sur un sol de ciment avant qu’un ami des forces armées ne le fasse sortir. Des dizaines d’autres activistes soudanais ont subi un traitement similaire par les SAF, alors que les RSF continuent à saisir du terrain.
Une personne utilisant le nom d’emprunt de Fatma Noon, s’exprimant au nom du comité de résistance Kalakla, a déclaré à Al Jazeera : « La première question qu’ils ont posée [à Osman] était de savoir s’il était membre des comités de résistance. Nous savons qu’ils nous prennent pour cible. »
Un grand nombre d’activistes détenus avaient aidé à organiser les manifestations massives qui ont conduit au renversement de l’ex-président Omar el-Beshir en avril 2019. Leur arrestation est considérée comme des représailles de la part des SAF.
Une personne utilisant le nom d’emprunt de Yousif Omer, membre d’un comité de résistance dans le bastion des SAF à Port-Soudan, a déclaré à Al Jazeera : « Certaines personnes dans l’armée disent que les bénévoles et les activistes coopèrent avec les RSF, mais c’est faux. Je pense qu’il s’agit d’arrestations politiques. Un grand nombre d’activistes arrêtés étaient actifs pendant la révolution [qui a renversé M. el-Beshir]. Aujourd’hui, ils font face à des accusations sans fondement. »
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