Une nouvelle étude traque les propriétaires étrangers des navires de pêche
PERSONNEL D’ADF
Afin d’aider les autorités à déceler la pêche illégale, une nouvelle étude combine l’identité de 35.000 navires et les données GPS de plus d’une décennie pour offrir une évaluation globale du respect des lois de la pêche, de la pêche conduite par les chalutiers étrangers et des modes de changement de pavillon.
L’étude publiée dans Science Advances a découvert que l’Afrique de l’Ouest, qui est l’épicentre mondial de la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN), est l’une des régions où les changements de pavillon se produisent le plus fréquemment. Cette situation existe lorsqu’un vaisseau change son pavillon d’un pays à un autre, souvent pour éviter les sanctions et la réglementation.
L’étude a été conduite par des chercheurs de Global Fishing Watch (GFW), Duke University et le Centre de résilience de Stockholm. Son auteur majeur est Jaeyoon Park, scientifique principal des données chez GFW, qui déclare espérer que ces résultats aideront les autorités, les chercheurs et les experts de la conservation à améliorer la gestion de la pêche et la mise en application des lois.
« Cette étude et nos données représentent un pas en avant, déclare M. Park à Mongabay. À mesure que les informations sur les navires deviennent disponibles dans le domaine public, il devient plus facile de détecter quels sont les vaisseaux qui suivent les règles et quels sont ceux qui les enfreignent. »
Les chercheurs projettent d’intégrer de plus amples données dans la carte interactive de GFW sur les activités des navires et d’actualiser celle-ci pour donner aux autorités des informations mises à jour.
La plupart des navires de pêche illégaux en Afrique de l’Ouest sont chinois. La Chine détient la flotte de pêche en eaux distantes la plus grande du monde et elle est le premier contrevenant du monde pour la pêche INN, selon l’Indice de pêche INN.
Les analystes déclarent que 40 à 60 % des poissons attrapés dans les eaux d’Afrique de l’Ouest sont péchés illégalement. Selon un nouveau rapport de la Financial Transparency Coalition, la région perd entre 2,3 et 9,4 milliards de dollars par an à cause de la pêche illégale.
La Chine cible aussi de plus en plus les eaux de l’Afrique du Sud-Est. L’étude montre que dans les zones économiques exclusives du Kenya et des Seychelles, les thoniers battent couramment le pavillon des Seychelles mais appartiennent à des Chinois.
Dyhia Belhabib, investigatrice principale chez Ecotrust Canada et directrice de Nautical Crime Investigation Services, est surprise par les résultats de l’étude indiquant que le changement de pavillon par les navires étrangers se fait souvent au port plutôt qu’en mer.
« Pour moi, le changement de pavillon au port pourrait indiquer qu’il ne s’agit pas d’une stratégie de distraction mais plutôt de l’emploi d’une carence légale pour obtenir des avantages stratégiques (administratifs ou économiques), déclare-t-elle à Mongabay. Les changements de pavillon après l’extinction des SIA [système d’identification automatique] sont aussi fréquents dans ce contexte. »
Les opérateurs de pêche INN sur le continent utilisent aussi couramment des sociétés fantômes et des accords de coentreprise qui rendent difficiles l’investigation et les poursuites intentées contre les navires accusés de pratiquer la pêche illégale.
Les sociétés fantômes sont créées pour détenir les fonds et gérer les transactions financières d’une autre personne morale ou physique. Elles ressemblent à des sociétés réelles mais n’existent que sur le papier. Un accord de coentreprise est une entente entre deux sociétés ou plus visant à créer une nouvelle société pour leur avantage mutuel.
Les auteurs de l’étude recommandent que les états de pavillon identifient « un lien authentique » entre le propriétaire bénéficiaire d’un chalutier (celui qui profite de la pêche) et son pavillon.
« Une recherche récente montre aussi que la combinaison des données confidentielles des autorités avec les SIA soutient les efforts des pays pour surveiller les navires qui battent un pavillon de complaisance », écrivent les auteurs. Un pavillon de complaisance permet à un propriétaire de navire d’utiliser les registres de navire ouverts pour pêcher en haute mer, là où les pays côtiers ne sont pas compétents pour intervenir.
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