PERSONNEL D’ADF
En août dernier, les terroristes du Mali ont tué 41 soldats maliens dans une attaque combinant l’artillerie et les camions piégés avec l’emploi des drones aériens.
Dans toute l’Afrique, les drones, qu’ils soient des armements militaires sophistiqués ou des modèles commerciaux pour amateurs, changent la nature des conflits. Les experts craignent que les groupes extrémistes ne s’efforcent de les acquérir et de les utiliser pour des attaques asymétriques.
Le chercheur Ezenwa Olumba a récemment écrit dans un article pour l’institut Firoz Lalji pour l’Afrique de la London School of Economics : « Jusqu’à récemment, les drones étaient utilisés exclusivement par les acteurs étatiques en Afrique. Les rapports récents concernant l’emploi des drones [par des acteurs non étatiques] et leur sophistication sont préoccupants. »
Que ce soit à cause des raids contre les bases militaires ou des achats directs, les drones sont devenus de plus en plus une composante de la stratégie des terroristes contre les armées nationales. Des groupes tels que Boko Haram au Nigeria et des groupes associés aux organisations basées au Moyen-Orient telles que l’État islamique et al-Qaïda adoptent la technologie.
Beaucoup de drones commerciaux proviennent de la Chine, qui a refusé d’empêcher les groupes terroristes de continuer à les employer, selon PAX, l’organisation néerlandaise pour la paix.
En 2019, al-Shebab a utilisé des drones en Somalie dans le cadre de son attaque contre une base militaire. En début d’année, l’armée mozambicaine a utilisé un système anti-drone fabriqué en Israël pour intercepter et abattre trois drones pilotés par des groupes extrémistes.
Jusqu’à présent, les groupes terroristes africains ont utilisé des drones principalement aux fins de surveillance et de soutien pour les forces sur le terrain. À l’encontre des groupes du Moyen-Orient qu’ils imitent, les groupes africains n’ont pas encore militarisé leurs drones en quantité importante.
Mais ce n’est qu’une question de temps avant que cela ne change, selon le conseiller de sécurité David Peddle, colonel (à la retraite) de la Force nationale de défense d’Afrique du Sud. Il a déclaré à l’Institute for Security Studies (Institut pour les études sur la sécurité) qu’il croit que les groupes terroristes déploieront en fin de compte des essaims de drones à bas prix, facilement acquis, contre des cibles africaines.
Les experts déclarent qu’il n’est pas trop tard pour que les pays africains essaient de stopper la vague de drones d’amateur avant qu’elle ne déferle sur leur pays. Ils indiquent la facilité avec laquelle les terroristes obtiennent des téléphones cellulaires pour démontrer que le génie des drones est sorti de la lampe.
« Comme pour l’interdiction des AK-47, toute tentative des gouvernements visant à interdire la possession et l’emploi des drones par des acteurs non étatiques est vouée à l’échec », écrit M. Olumba.
Plutôt que d’interdire les drones, les experts recommandent une double approche. Premièrement, surveiller les importations pour déceler les gros achats tout en exigeant que les drones soient enregistrés avec le gouvernement. Deuxièmement, augmenter le déploiement des technologies qui peuvent bloquer la capacité des drones à naviguer ou à communiquer avec leurs opérateurs. Cette tactique les force souvent à retourner à leur base ou à tomber au sol.
« Cette approche nécessitera d’obtenir les talents des enthousiastes amateurs de drones du futur et leur fournira l’accès à une éducation mondiale sur les drones, puis elle les emploiera dans les services nationaux pour riposter aux menaces locales », écrit M. Olumba.
Les gouvernements devraient utiliser les jeunes experts versés en technologie avant que les terroristes ne le fassent, écrit-il.
On craint que les groupes tels que la Province d’Afrique de l’Ouest de l’État islamique ne commencent à militariser leurs drones pour les attaques, selon le rapport Remote Horizons de 2021 de PAX, qui a étudié l’emploi des drones dans les conflits africains.
Les experts craignent aussi l’utilisation de la technologie de l’impression 3D qui permet aux personnes de construire des drones avec peu de supervision.
L’analyste Karen Allen basée en Afrique du Sud a écrit récemment pour l’Institute for Security Studies que les drones « transforment le commerce, l’agriculture, le secours humanitaire et la médecine en Afrique. En même temps, le continent présente un environnement vulnérable où les drones militarisés peuvent être testés et utilisés par les forces armées tout comme les insurgés. »