PERSONNEL D’ADF
Les Nigérians font monter la pression sur leur gouvernement afin qu’il assume responsabilité pour l’endettement croissant à l’égard de la Chine et pour le manque de transparence qui, selon eux, pourrait menacer la souveraineté de la nation.
Le Projet des droits et de la responsabilité socio-économiques (SERAP), organisme sans but lucratif qui championne la transparence concernant les droits économiques et sociaux au Nigeria, a engagé une action fédérale en justice en août dernier pour exiger que le président Muhammadu Buhari publie les détails des emprunts chinois depuis mai 2015, y compris les taux d’intérêt, le montant total de l’endettement et les détails des projets.
L’Alliance pour la survie au Covid-19 et au-delà, coalition de plus de 70 organisations syndicales et de la société civile, soutient la demande de transparence, dans sa déclaration du 2 août.
« Des millions de Nigérians continuent à affronter des difficultés économiques sévères, sans accès aux nécessités de base, mais le profil d’endettement du pays continue à croître, selon cette déclaration. Cela est d’autant plus horrifiant que le gouvernement continue à emprunter au nom du peuple sans son consentement ou sa bonne compréhension des conditions. »
Un autre groupe, le Mouvement pour un agenda radical de l’Association de juristes du Nigeria (RAMINBA), est allé encore plus loin pour faire pression, en demandant au président Buhari et à l’Assemblée nationale d’annuler le prêt de construction d’un chemin de fer, d’une valeur de 5,3 milliards de dollars, entre le Nigeria et la Banque d’état chinoise d’exportation et d’importation (Exim).
Le problème le plus alarmant pour ces groupes est la souveraineté du Nigeria en cas de non-paiement.
Les contrats contiennent la clause suivante : « L’emprunteur renonce irrévocablement par la présente à toute immunité basée sur la souveraineté ou autrement, pour lui-même ou pour ses biens, en rapport avec la mise en application de toute sentence arbitrale concernant la présente, à l’exception de son actif militaire et de son actif diplomatique ».
Adesina Ogunlana de RAMINBA décrit cette situation comme un état d’urgence.
« La dette du Nigeria représente aujourd’hui 96 % de ses revenus indépendants », déclare-t-il lors d’une conférence de presse. « Ceci veut dire que, pour chaque naira de revenu gagné par le pays, 96 kobos sont utilisés pour le remboursement des prêts. »
« Comment est-il possible qu’un gouvernement qui a juré de protéger et de promouvoir les intérêts du peuple puisse conclure librement et volontairement un accord qui habilite un autre pays à saisir, contrôler, utiliser et s’approprier tout son actif, à l’exception de l’actif militaire ou l’actif diplomatique ? »
Le procès du SERAP a été intenté à la suite de sa demande d’accès à l’information du 30 mai, soumise au président Buhari et exprimant « son inquiétude selon laquelle, alors que les gouvernements empruntent de l’argent depuis 1999 au nom du Nigeria et de ses citoyens, il est signalé qu’une grande partie de cet argent est mal gérée, volée ou gaspillée, en laissant aux citoyens le fardeau de rembourser les prêts ». Le Nigeria est passé d’un gouvernement militaire à un gouvernement civil en 1999.
De son côté, le Bureau nigérian de gestion de la dette a reconnu un endettement de 3,12 milliards de dollars à l’égard de la Chine, tout en rejetant la notion que la souveraineté de la nation soit menacée.
« Le remboursement de la dette est reconnu et les paiements sont prévus », indique une déclaration sur le site Web du gouvernement. « En outre, un certain nombre de projets financés (ou à financer) par les prêts produisent des revenus ou en produiront potentiellement. »