UNE INSTALLATION DE L’AUTORITÉ INTERGOUVERNEMENTALE Pour LE DÉVELOPPEMENT (IGAD) UTILISERA LA RECHERCHE ET L’ENGAGEMENT POUR LUTTER CONTRE L’EXTRÉMISME VIOLENT
PERSONNEL D’ADF
L’Afrique de l’Est s’étend depuis les montagnes de l’Érythrée vers le Sud dans la vallée du Grand Rift, qui s’enfouit à Djibouti, traverse l’Éthiopie et finit au Kenya. La Somalie entoure sa voisine l’Éthiopie au niveau de la corne de l’Afrique. Vers l’Ouest, le Soudan du Sud, le Soudan et l’Ouganda bornent la région qui forme l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), l’une des huit communautés économiques régionales reconnues par l’Union africaine.
C’est une région connue pour sa riche histoire et sa géographie et sa culture diversifiées. Toutefois, la région a récemment été notée pour des cas extraordinaires d’extrémisme violent.
La région s’organise maintenant pour combattre l’extrémisme violent avec l’aide du Centre d’excellence IGAD pour la prévention et la répression de l’extrémisme violent (ICEPCVE), récemment créé. Ce centre, qui a été conçu en 2015, est devenu opérationnel en octobre 2016 et a inauguré ses installations de Djibouti en avril 2018, aidera à créer et développer des capacités de « puissance souple », telles que la recherche, dans la lutte contre l’extrémisme.
« La lutte contre le terrorisme et la prévention et la répression de l’extrémisme violent sont les deux facettes d’une même idée, la lutte contre l’extrémisme violent, mais leurs stratégies sont radicalement différentes, la première donnant priorité à l’approche “dure” et la deuxième à la puissance “souple” », selon l’exposé de l’IGAD : « La stratégie régionale pour la prévention et la répression de l’extrémisme violent ».
Le centre a été établi pour échanger les meilleures pratiques et les leçons apprises dans toute la région de l’IGAD. Le personnel des états et les acteurs non étatiques travailleront pour renforcer la coordination et les stratégies contre l’extrémisme violent. Le point crucial de ces efforts consistera à « exploiter les connaissances de base des communautés locales et les engager comme participants actifs », selon la mission du centre. Tous les états membres de l’IGAD et la Tanzanie participeront à ces efforts. En novembre 2018, le centre avait cinq membres d’équipe permanents et un responsable représentant le gouvernement français.
Le mandat du centre possède cinq composantes :
- Il aidera à établir des partenariats entre les gouvernements, les organisations non gouvernementales et d’autres.
- Il aidera à développer la résilience communautaire contre l’extrémisme violent par l’intermédiaire d’efforts conduits localement.
- Il assistera les gouvernements nationaux sur des questions techniques.
- Il aidera à fournir une formation sur la prévention et la répression de l’extrémisme violent et d’autres activités par des organismes partenaires pour élargir l’expertise régionale.
- Il cartographiera la recherche entreprise dans la région, analysera les lacunes et engagera des recherches additionnelles.
- La responsabilisation et l’équipement des chercheurs efficaces est l’un des domaines où le centre s’est déjà distingué.
LA RECHERCHE EST AU CŒUR DE LA MISSION DU CENTRE
Le centre a organisé un atelier à Mombasa (Kenya) en mai 2018 pour former des chercheurs d’Afrique de l’Est sur la meilleure façon d’étudier l’extrémisme violent. Djibouti, l’Éthiopie, le Kenya, la Somalie, l’Ouganda et la Tanzanie ont chacun envoyé trois chercheurs pour y participer.
Le Dr Simon K. Nyambura, directeur de l’ICEPCVE, a déclaré à ADF qu’il était crucial d’effectuer une recherche empirique bien fondée pour développer une politique de prévention et de répression de l’extrémisme violent. « Parce que plus nous pensons que nous connaissons le sujet, et plus nous l’étudions, plus nous découvrons que nous connaissons très peu de choses, déclare le Dr Nyambura. Par conséquent, la recherche est devenue cruciale, même pour nous, qui avons continuellement poursuivi cette recherche et découvert les causes réelles, les facteurs réels, les tendances. »
Ceux qui ont participé au séminaire ont reçu des subventions de 5.000 dollars pour financer des recherches. Ces recherches seront réunies dans un livre et publiées. On espère que ce processus sera répété dans les années suivantes.
La recherche est emblématique de l’approche de la puissance souple pour réprimer l’extrémisme violent. Afin de faire face aux facteurs qui conduisent à l’extrémisme, il faut d’abord obtenir une bonne compréhension du contexte dans lequel l’extrémisme survient dans les communautés, les cultures et les groupes. La responsabilisation de ces chercheurs aide l’IGAD à développer un ensemble de connaissances sur les facteurs sexospécifiques, religieux, économiques et historiques dans la région.
L’atelier de Mombasa s’est concentré sur deux domaines clés :
- Les participants ont analysé un manuel de formation sur les « méthodes de terrain qualitatives, basées sur la confiance », lequel avait été préparé avant l’atelier. Ces informations aideront les chercheurs à obtenir la confiance des personnes interviewées sur le terrain et à se présenter eux-mêmes et présenter leurs qualifications efficacement aux autorités locales.
- Les équipes des pays ont identifié des hypothèses et des extraits de recherche qui formeront la base de deux articles de recherche pour chaque pays participant.
- Il était prévu que les articles seraient présentés lors de la première Conférence du réseau de chercheurs de la corne d’Afrique et de l’Afrique de l’Est sur la P-CVE du centre vers la fin 2018. Il est prévu de publier ces articles.
- Le centre a aussi participé à ou a parrainé d’autres séminaires depuis qu’il est ouvert. Par exemple, en novembre 2018 il a organisé un atelier sur l’amplification des voix des jeunes leaders africains dans la lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent.
UNE STRATÉGIE RÉGIONALE
En 2018, l’IGAD a publié sa « Stratégie régionale pour la prévention et la répression de l’extrémisme violent », effort dans lequel la participation du centre était cruciale, déclare le Dr Nyambura. Il dirige aussi la mise en œuvre de la stratégie dans toute la région.
Le rapport identifie quatre catégories d’extrémistes qui ont œuvré pour recruter et radicaliser les habitants d’Afrique de l’Est. Elles sont :
Les groupes terroristes internationaux tels que les militants pro-palestiniens des années soixante à quatre-vingt, qui ont plus tard cédé le pas à al-Qaïda et à l’EIIL dans les années quatre-vingt-dix et plus récemment.
Les affiliés de l’EIIL et d’al-Qaïda, les deux groupes terroristes internationaux majeurs.
Les groupes terroristes indigènes ou intérieurs tels qu’al-Shebab qui s’est manifesté en Somalie après sa guerre civile.
Les groupes militants indigènes non islamistes tels que l’Armée de résistance du Seigneur.
La « stratégie régionale fournit la structure requise pour coordonner les réponses des communautés, des gouvernements et des organisations pour détecter, dissuader et vaincre les groupes extrémistes ».
La stratégie énumère trois réponses à l’extrémisme violent. Elles sont la lutte contre le terrorisme, qui utilise des mesures de sécurité « dures » telles que les forces armées ou la police, les opérations secrètes et le système de justice criminelle. Puis la répression de l’extrémisme violent (CVE), qui s’appuie en général sur des réponses plus douces en cherchant à comprendre, empêcher et affronter les causes sous-jacentes de l’extrémisme. Finalement, la prévention de l’extrémisme violent (PVE). Cette dernière est étroitement alignée sur la CVE mais elle met l’accent sur les tentatives d’atténuation des menaces provenant des personnes qui sont déjà engagées dans l’extrémisme violent.
Les mesures anti-terroristes plus fortes ont leur place dans la lutte contre l’extrémisme violent, déclare le Dr Nyambura, en particulier lorsqu’on confronte des groupes tels qu’al-Shebab en Somalie. Mais selon lui, c’est avec la CVE et la PVE que le plus de progrès peut être réalisé contre l’extrémisme violent.
« Je pense que nous devons gagner les cœurs et les esprits des gens, en particulier ceux des jeunes, en travaillant avec eux, déclare-t-il. Nous devons refuser aux extrémistes le terrain fertile qu’ils utilisent pour recruter et radicaliser les jeunes. »