UN « GROUPE DE RÉFLEXION » POUR LA RECHERCHE VOIT LE JOUR DANS L’ÉCOLE DE GUERRE DU NIGERIA.
PERSONNEL D’ADF/PHOTOS DE L’ÉCOLE DE LA DÉFENSE NATIONALE DU KENYA
Tout a commencé par le commandement de combat, l’art de diriger et de mener les forces armées contre l’ennemi.
Le commandement de combat constituait le programme principal des premières écoles d’état-major militaires, aussi connues sous le nom d’écoles de guerre ou d’écoles de défense. La première école d’état-major moderne a été créée en 1810. Elle se consacrait principalement à la stratégie militaire. Or, les écoles d’état-major africaines, parmi les plus jeunes du monde, ont largement dépassé le stade de l’apprentissage de l’art de la guerre.
L’école de la défense nationale du Nigeria (National Defence College ou NDC) est un cas typique. Bien que son programme de 11 mois comprenne la formation classique d’officiers supérieurs militaires et civils aux fonctions de commandement, ses cours s’étendent à la politique et à la recherche. Les neufs « blocs » du programme incluent les études de guerre, la méthodologie de la recherche, l’économie, les sciences et les technologies, les opérations de soutien de la paix ainsi que les affaires internationales. Les instructeurs affirment que le programme est souple et qu’il n’existe pas toujours de réponses précises pour certaines questions.
« Le programme de cours a été établi de sorte que les participants soient confrontés à une diversité de problèmes pour lesquels il n’existe aucune solution standard, a précisé l’école. Les participants sont encouragés à réfléchir et à remettre en question leurs propres hypothèses et points de vue sur la nature de la guerre, la paix, le commandement, la politique, l’éthique et l’usage de la force. »
L’école se classe parmi les plus ambitieuses du monde. En général, les promotions comptent 200 élèves. Au total, 21 promotions ont obtenu leur diplôme depuis la création de l’école. Les élèves dont les grades vont du lieutenant colonel au général de brigade proviennent de l’armée de terre, de la marine et de l’armée de l’air. Par ailleurs, des civils sont envoyés par des instances gouvernementales. En fin de formation, les élèves obtiennent une maîtrise.
Comme la plupart des écoles de guerre d’Afrique, la NDC recrute des élèves dans d’autres pays. Généralement, entre 8 et 10 pour cent des élèves sont étrangers.
L’école de guerre encourage l’échange libre d’idées. Elle a adopté une politique d’anonymat dans l’enceinte de l’école, où les élèves et les enseignants peuvent s’exprimer librement, « mais en privé pour un public privilégié ».
Les objectifs de l’école comprennent:
- l’enseignement des fonctions de commandement avec une bonne compréhension des considérations géographiques touchant le Nigeria, l’Afrique et le reste du monde ;
- la compréhension des éléments du pouvoir national et de l’élaboration d’une stratégie nationale ;
- la formation à des opérations conjointes et multinationales ;
- la gestion, dans un cadre démocratique, des intérêts de la défense dans le contexte plus large des intérêts nationaux ;
- la recherche universitaire poussée au niveau national ;
- la formulation de recommandations sur des questions nationales et internationales spécifiques.
LE « GROUPE DE RÉFLEXION » MILITAIRE DU NIGERIA
La NDC comprend aussi un Centre de Recherches et d’Études stratégiques, créé en 1996, dans l’idée qu’une paix totale et durable exige l’étude et la compréhension de la violence et des guerres mais aussi de la manière de les prévenir et de les résoudre.
Le Centre est structuré de manière à renforcer le programme de cours de la NDC, de sorte qu’il reste pertinent face aux derniers développements dans le maintien de la paix et de la sécurité internationale. En tant que composante de recherche de la NDC, ses fonctions consistent à soutenir la NDC dans la recherche, la documentation et la publication des résultats de la recherche. Il sert de « groupe de réflexion » à l’école, aux trois services et au pays dans les domaines de la défense, de la sécurité et de la science militaire.
Le centre est chargé de suivre les événements et les développements dans le monde qui peuvent avoir un impact sur le Nigeria et sur l’Afrique. Il collabore aussi avec des organisations régionales et continentales, comme l’Union africaine, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, la Communauté de développement de l’Afrique australe et l’Autorité intergouvernementale sur le développement.
Le Centre lève aussi des fonds pour la recherche et fournit des stages et des bourses aux experts invités. Les tâches du Centre ont été réparties entre quatre divisions :
La Division des études sectorielles et régionales fournit des informations aux décideurs politiques du Nigeria sur toute zone ou région du monde.
La Division des conflits, du maintien de la paix et des études humanitaires mène des recherches et organise des formations sur les conflits, sur les opérations de soutien de la paix et sur les questions humanitaires au Nigeria et en Afrique. Elle collabore avec d’autres organisations comme l’Union africaine, dans le domaine du renforcement des capacités pour les formations de maintien de la paix stratégique.
La Division de la gouvernance et de la politique publique est la composante de « bon gouvernement ». Elle se concentre sur la recherche sur l’État de droit, la gouvernance constitutionnelle, la transparence, la responsabilité, les droits de l’homme, les élections, les mesures politiques et d’autres domaines de la démocratie.
La Division de la défense et des études de sécurité se concentre sur l’établissement d’une sécurité durable et sur les défis posés par la mondialisation.
UN ENGAGEMENT D’UN AN
Les écoles d’état-major d’Afrique ont une autre mission, à savoir réunir les futurs dirigeants miliaires de différents pays. L’engagement est de taille étant donné que les cours des officiers supérieurs durent environ un an en règle générale. L’École de la défense nationale du Kenya est typique : en mai 2014, 41 élèves représentant 15 pays ont obtenu leur diplôme. Parmi eux, se trouvaient des officiers des forces de la défense kenyane, des fonctionnaires de haut niveau et plus d’une centaine d’officiers militaires et de fonctionnaires étrangers. La participation des femmes est vivement encouragée.
En 2012, les 43 diplômés de l’École supérieure de commandement et d’état-major de l’Ouganda comptaient 12 représentants de cinq autres pays de la région. En Afrique du Sud, l’École de guerre nationale sud-africaine met l’accent sur la participation d’officiers des armées de la Communauté de développement de l’Afrique australe.
En général, les écoles de guerre acceptent aussi des élèves civils. L’École de la défense nationale de Tanzanie a remis un diplôme à 20 élèves en juillet 2013. La composition de la classe était typique de ces écoles : parmi les 20 diplômés, huit étaient des militaires avec le rang de général de brigade et de colonel, et le reste provenait de différents secteurs de la fonction publique avec le rang de directeur ou un équivalent. Cette école a mis au point une stratégie sur dix ans afin de créer une capacité autosuffisante d’enseignement, de gestion administrative et d’installations pour gérer jusqu’à 100 participants.
Le personnel des écoles de guerre est tout aussi diversifié que les élèves. Parmi les instructeurs de la première classe de diplômés de Tanzanie, se trouvaient des ministres du gouvernement, des professeurs d’université, des officiers supérieurs de services de la défense ainsi que des hauts fonctionnaires et de grands industriels, certains originaires d’autres pays.
Les voyages à l’étranger peuvent faire partie de la formation dispensée dans les écoles de guerre. L’École de la défense nationale de Tanzanie, par exemple, a envoyé des élèves au Japon pour y rencontrer des spécialistes de la défense. En 2013, l’école a envoyé des délégations au Liberia, au Maroc, au Rwanda et en Ouganda.
La flexibilité est devenue la marque de fabrique des écoles d’état-major dans le monde entier. Les écoles africaines ne font pas exception. Elles modifient leur programme pour s’adapter aux événements mondiaux. Les écoles d’état-major nigérianes, par exemple, ont annoncé en juin 2014 qu’elles lançaient un programme de formation national pour les officiers et les militaires de carrière sur les tactiques à adopter face au groupe extrémiste Boko Haram. Des responsables ont déclaré qu’ils avaient commencé « un exercice pratique de manœuvres dans une simulation de guerre », dans le but de lutter contre l’insurrection.
De tels jeux de guerre sont une spécialité de l’École nationale de guerre d’Afrique du Sud. Son programme « phare » est l’Exercice africain conjoint et combiné (EACC) mené par les armées de la Communauté de développement de l’Afrique australe (CDAA). Des responsables ont précisé que les exercices théoriques seront liés à l’avenir à la Force africaine en attente projetée par l’Union africaine.
L’EACC a été créé en 2007 sur le modèle de l’Exercice européen conjoint et combiné, mené par l’OTAN. L’EACC permet aux pays de la CDAA de mieux comprendre l’environnement conjoint, multinational et interinstitutionnel. Il stimule une meilleure compréhension des problèmes liés à la planification et à la coordination d’opérations multinationales complexes de soutien de la paix.