PERSONNEL D’ADF
Président fondateur du Ghana, Kwame Nkrumah a accédé aux sommets du pouvoir et connu les abîmes de l’échec. Aujourd’hui, malgré ses erreurs, il est considéré comme un héros, dans son pays comme dans le reste du continent.
Né en 1909 dans la colonie britannique de la Côte d’Or appelée Gold Coast en anglais, Kwame Nkrumah a fréquenté l’une des meilleures écoles de son pays avant de partir aux États-Unis en 1935. Diplômé de l’université Lincoln en Pennsylvanie, la plus ancienne université noire des États-Unis, en 1939, il a embrassé la culture noire américaine et est devenu ami avec ses intellectuels. Il a été élu président de l’Organisation des étudiants africains d’Amérique et du Canada.
Kwame Nkrumah a poursuivi sa carrière à Londres où, inspiré par l’indépendance de l’Inde, il a activement participé au mouvement pour la décolonisation de l’Afrique et a été l’un des organisateurs du cinquième Congrès panafricain en 1945. Deux ans plus tard, il est retourné dans son pays qu’il a trouvé sur la voie de l’indépendance. Or, pour lui, les choses n’avançaient pas assez vite. Il a donc créé le Convention People’s Party et voyagé à travers le pays en appelant à la grève et aux boycotts. Des violences ont éclaté et il a été arrêté par les Britanniques qui l’ont condamné pour insurrection à trois ans de prison.
Son arrestation a fait de Kwame Nkrumah un héros. La loi britannique l’autorisait à se présenter aux élections législatives depuis sa geôle. En 1951, son parti a remporté une victoire écrasante, avec 34 des 38 sièges à pourvoir. Il a été libéré quelques jours plus tard, après 14 mois de détention. En moins d’une journée, il est devenu le nouveau premier ministre du pays.
Dans son livre The Fate of Africa (Le destin de l’Afrique), Martin Meredith a écrit que les choses avançaient tellement vite que Kwame Nkrumah s’est demandé s’il n’était pas en train de rêver et s’il n’allait pas se retrouver « assis par terre dans sa cellule en train de manger un bol de porridge ».
Alors qu’il était premier ministre, l’autorité suprême se trouvait toujours entre les mains du gouverneur britannique. En juillet 1953, Kwame Nkrumah a introduit une motion au Parlement exigeant l’auto-détermination pour son pays. L’année suivante, les Britanniques ont accepté une nouvelle constitution avec un gouvernement entièrement africain.
À minuit, le 6 mars 1957, le Ghana était né, du nom d’un empire africain du 11e siècle.
Le nouveau pays possédait de nombreux atouts : il était l’un des plus riches du continent, avec de bonnes écoles, une classe moyenne aisée et un système judiciaire honnête et équitable. Son nouveau président avait de l’expérience et était âgé de 47 ans seulement.
En 1961, Kwame Nkrumah s’est rendu en Union soviétique pour y étudier son industrialisation. Il en est revenu avec un plan socialiste de sept ans. Il a commencé à mettre en place des services d’utilité publique et à créer des entreprises d’État. Cependant, il allait trop vite en besogne. Très vite, son pays a sombré dans la gabegie et la corruption. Il a dépassé largement le budget de son pays et a utilisé les revenus du cacao pour éponger les pertes du Ghana, au grand dam des planteurs de cacao.
Lorsqu’il défendait l’indépendance, il avait appelé à la grève et au boycott. Devenu président, il a interdit de telles pratiques. Il a également édicté une loi sur la détention préventive qui permettait à son administration d’arrêter et de détenir quiconque représentait un risque pour la sécurité publique, sans droit à un procès équitable. Il détenait des prisonniers sans les avoir jugés, ce que même les colons britanniques n’avaient jamais fait.
Occupé à échafauder des plans pour l’unité africaine, Kwame Nkrumah a apparemment perdu tout intérêt pour son propre pays. Il a fait du Ghana un pays à parti unique en 1964 et s’est fait appeler Osagyefo, « le rédempteur ».
Le 24 février 1966, il s’est rendu en Chine avec le noble projet de mettre fin à la guerre du Vietnam. En son absence les officiers de son armée se sont rebellé et se sont emparés du gouvernement. Il a été contraint de vivre en Guinée, un autre pays qui s’essayait au socialisme. Il n’avait pas perdu l’espoir de reprendre un jour le pouvoir. Or, il est mort en exil en 1972.
Le temps a redoré son blason. La date de son anniversaire est un jour férié au Ghana. La BBC l’a décrit comme « le dirigeant du premier pays africain noir à s’être libéré des chaînes du colonialisme ». On se souvient de lui comme d’un visionnaire mais aussi d’un leader de l’indépendance africaine et de l’unité africaine.
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