Africa Defense Forum

UN ATELIER DE RÉPARATION OFFRE UN NOUVEAU DÉPART AUX ANCIENS ENFANTS SOLDATS

THOMSON REUTERS FOUNDATION

Louis Lakor rêvait déjà de devenir enseignant alors qu’il n’était encore qu’un petit garçon qui pourchassait les poulets sur la ferme de ses parents au Nord de l’Ouganda. Pourtant, lorsqu’il mit enfin pied dans une école primaire locale à l’âge de 7 ans, c’était en tant que tueur armé.

Louis Lakor a été kidnappé pendant un raid nocturne et forcé à devenir un enfant soldat par l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), groupe rebelle qui a semé la terreur dans le nord de l’Ouganda pendant près de deux décennies avant d’être chassé du pays suite à une offensive militaire en 2005. Avec une arme au poing qui lui avait été confiée par ses ravisseurs, Louis avait pour ordre de « tirer sur tout ce que tu vois ». C’est ce qu’il a fait.

« Sinon ils m’auraient tué », déclare-t-il 20 ans plus tard, le regard posé sur la campagne verdoyante près de son village natal d’Awach, à environ 60 kilomètres au Sud de la frontière de l’Ouganda avec le Soudan du Sud.

M. Lakor est maintenant âgé de 27 ans et aide d’autres anciens enfants soldats à obtenir des qualifications allant de la mécanique automobile à la menuiserie, la couture et la coiffure.

« Lorsque je forme les jeunes ici, je leur raconte mon histoire », déclare-t-il en parcourant l’atelier bruyant où de grands adolescents s’affairent à souder, scier et marteler. « Je leur dis d’où je viens, que je suis comme eux, que je suis toujours un orphelin qui cherche à survivre. »

M. Lakor a pu échapper à la LRA au bout de quatre ans. Il a fini par mendier dans les rues de Gulu, la principale ville de la région. Il a finalement rencontré Peter Owiny Mwa, propriétaire de Baka General Motors, qui a décidé de lui donner une chance et de l’embaucher tout d’abord comme agent d’entretien, puis de le former comme mécanicien. En 2013, Louis Lakor demande à M. Mwa de lui permettre de former et d’embaucher des anciens jeunes de la LRA.

Aujourd’hui, le centre de formation des jeunes de Baka, constitué d’une cour encombrée à ciel ouvert entourée de bâtiments en bois vétustes, aide environ 60 garçons et filles chaque année avec peu de soutien financier extérieur. M. Lakor conduit également un mototaxi pour couvrir le loyer.

Les anciens jeunes de la LRA, dont certains présentent des cicatrices de coups de feu ou de machette sur les bras et les jambes, dorment à deux sur des matelas simples crasseux jetés au sol d’une pièce souillée à la peinture qui pèle, sans moustiquaires ni vitres aux fenêtres. L’un des élèves âgé de 18 ans, Godfrey Oloya, est né en captivité chez la LRA et porte toujours une balle logée dans son bras, « souvenir » de sa fuite sous les tirs lorsqu’il avait 7 ans.

« Lorsque j’aurai terminé ici, je veux conduire un taxi ou un camion », déclare-t-il devant les mécaniciens en herbe qui s’entraînent sur la carcasse rouillée d’une vieille Volkswagen Coccinelle couleur petit pois des années 70.

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