Africa Defense Forum

Des succès et des appels à la prudence caractérisent les six premiers mois des efforts liés au Covid-19

PERSONNEL D’ADF

Cela fait plus de six mois depuis que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) avait identifié pour la première fois le virus appelé SARS-CoV-2. Dans l’intervalle, ce virus s’est propagé dans tous les pays du monde. Il a infecté plus de 8 millions de personnes, dont 438.000 ont trouvé la mort, et il a sapé les fondements d’une grande partie de l’économie mondiale.

Les pays africains n’ont pas été immédiatement frappés par le Covid-19, maladie respiratoire provoquée par le virus. Le Nigeria signala les premiers cas de la maladie en Afrique subsaharienne le 28 janvier. Mais ensuite la maladie s’est transmise rapidement. Le jalon des 100.000 cas positifs a été atteint en 98 jours, mais 18 jours plus tard le chiffre a doublé, selon l’OMS.

Vers la mi-juin, les 54 pays du continent ont tous signalé des contacts avec la maladie. Le nombre total de cas positifs s’est élevé à plus de 242.000, selon les Centres africains pour le contrôle et la prévention des maladies.

« Pour le moment, l’Afrique ne possède toujours qu’une petite fraction des cas positifs mondiaux », selon la déclaration du Dr Matshidiso Moeti, directrice régionale de l’OMS, lors d’une conférence de presse tenue le 11 juin. « Mais la progression des transmissions s’accélère. Les mesures rapides et précoces prises par les pays africains ont aidé à limiter l’augmentation du nombre de cas, mais il est nécessaire de rester vigilant pour empêcher le Covid-19 d’excéder les capacités des centres de santé. »

L’impact sur la santé

Le continent africain, qui possède 17 % de la population mondiale, signale à l’heure actuelle environ 3 % des cas positifs mondiaux de Covid-19 et 1 % des décès mondiaux. Il est difficile d’obtenir des chiffres précis, notamment à cause du manque de tests de dépistage.

Les infections et les décès signalés ne sont pas distribués uniformément sur le continent. Le Dr Moeti indique que 10 des 54 pays africains enregistrent jusqu’à présent 80 % des transmissions confirmées du virus. Pour le moment, la plupart des cas signalés se manifestent dans les villes à forte densité de population, telles que les capitales nationales, mais le virus est aussi documenté dans les zones rurales au-delà des villes, explique le Dr Moeti.

Le bureau du Dr Moeti signale que les taux de transmission les plus rapides existent en République centrafricaine, en Éthiopie, en Mauritanie, au Soudan du Sud et au Zimbabwe. Le Malawi et la Namibie signalent des concentrations de cas positifs, alors que leurs ressortissants en provenance des pays affectés continuent à revenir. Trois nouveaux pays, à savoir le Cap-Vert, l’Éthiopie et l’Ouganda, ont signalé des cas d’infection chez les professionnels de la santé. Le 15 juin, les bureaux de l’OMS en Mauritanie indiquent sur Twitter l’arrivée de masques et de fournitures médicales donnés par le pays voisin du Maroc. Le Maroc a envoyé par avion des fournitures semblables vers beaucoup de pays figurant sur la liste de l’OMS.

L’Afrique du Sud possède le plus grand nombre d’infections du continent, suivie par le Nigeria, le Ghana et l’Algérie. L’Afrique du Sud a le meilleur système de soins de santé du continent, mais elle a aussi des millions de personnes vulnérables à l’infection de Covid-19 en raison de problèmes de santé préexistants tels que le VIH et la tuberculose.

« Les gens qui auparavant étaient fragilisés courent maintenant deux fois plus de risques », déclare Claire Keene, coordinatrice médicale de Médecins sans frontières (MSF), à National Geographic. MSF gère un hôpital de campagne avec les autorités locales de santé dans la communauté de Khayelitsha, qui fait partie de la région métropolitaine du Cap.

La région du Cap-Occidental est devenue le pire point sensible d’Afrique du Sud pour le Covid-19. En outre, Khayelitsha a la plus grande concentration de cas de tuberculose dans la région, ainsi qu’un grand nombre de personnes séropositives. Les exigences de réponse au Covid-19 ont laissé de côté les efforts liés aux patients souffrant du VIH et de la tuberculose, selon les responsables de MSF.

En outre, ces mêmes responsables déclarent que les tests de dépistage positifs du Covid-19 sont stigmatisants. Beaucoup de gens de la région évitent donc ces tests, et courent le risque de devenir des vecteurs potentiels du virus.

« Il nous faudra des années pour récupérer ce que nous avons perdu au cours de ces derniers mois », selon la déclaration de Gavin Churchyard, PDG de l’Aurum Institute (organisme de recherche et de santé sans but lucratif basé à Johannesbourg), faite à National Geographic.

La situation actuelle

Puisque les systèmes de soins de santé du continent ont une capacité limitée, les Africains ont commencé à développer leurs propres solutions locales pour résoudre le problème du Covid-19.

  • L’Armée de l’air nigériane est parmi plusieurs organisations qui ont développé une technologie visant à satisfaire à la grande demande de respirateurs pour les cas graves de Covid-19.
  • Le Niger utilise l’appli de téléphone portable WhatsApp pour contrecarrer la désinformation concernant le virus.
  • La technologie des drones développée par le Maroc aide à obtenir les fournitures, à surveiller les confinements et à désinfecter les lieux publics par les survols de drone.
  • Les animateurs, les artistes et les musiciens ont trouvé de nouveaux moyens de communiquer les techniques de prévention de l’infection de Covid-19, notamment le lavage des mains. C’est en effet le thème de la vidéo Lava as tuas mãos (lave-toi les mains) du groupe populaire de musique reggae de fusion GranMah.

Au début, de nombreux pays africains exportateurs étaient devenus des importateurs nets alors que la demande de fournitures médicales excédait les approvisionnements locaux. Mais cela commence à changer : l’Afrique du Sud et d’autres pays accélèrent leur production de masques, de désinfectant pour les mains et autres outils cruciaux dans la lutte contre le Covid-19, et ils échangent entre eux ces produits.

« La crise du coronavirus devrait encourager l’Afrique à lancer une industrie locale de produits pharmaceutiques et d’équipement médical pour renforcer les systèmes nationaux de santé et de sécurité, et pour mieux préparer la région aux crises futures de santé publique », écrit Hippolyte Fofack, économiste en chef de la Banque d’exportation et d’importation d’Afrique, dans un article du 11 juin publié dans le magazine African Business.

Grâce aux décennies d’expérience pendant lesquelles les pays africains ont enrayé les épidémies telles que l’Ebola, la réponse à l’épidémie de Covid-19 a été rapide et opportune, en utilisant des outils épidémiologiques tels que les tests de dépistage, la recherche des contacts et autres. Mais le virus continue à se propager, et donc la pression exercée sur l’infrastructure de santé du continent est visible.

Voici un signe avant-coureur de ce qui pourrait se produire : le 14 juin, la capitale du Botswana est retournée en situation de confinement à cause du nombre croissant d’infections, alors que les restrictions avaient été relâchées au mois de mai. Le pays a enregistré un nombre relativement faible de cas positifs de Covid-19, comparé à ses voisins.

Lors d’un discours télévisé, le directeur des services de santé Malaki Tshipayagae a annoncé quatre nouveaux cas positifs importés aux frontières du Botswana et huit autres dans un hôpital privé de Gaborone, la capitale du pays. Il a déclaré que ces nouveaux cas avaient amené le nombre cumulatif de cas positifs de Covid-19 à 60 au Botswana.

« Même si les infections africaines s’élèvent à moins de 3 % du nombre total de cas positifs dans le monde, il est clair que cette pandémie s’accélère », a déclaré le Dr Moeti dans son briefing du 11 juin.

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